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SOUS LE SOLEIL / ECRIT PERSONNEL

SOUS LE SOLEIL / ECRIT PERSONNEL

SOUS LE SOLEIL

 

Depuis longtemps, lorsque le soleil imposait un calme impressionnant sur la ville, à l’heure où le corps des hommes se sentait las et vaincu, Jean savait qu’il pouvait sortir et marcher longuement par les rues, sans rencontrer personne.

Jean aimait ces moments un peu hors du temps où le ciel était brûlant, où son cœur se desséchait encore davantage. Il entendait en lui tous les mots qu’il ne prononçait plus, les mots que sa solitude renvoyait, inlassablement, comme des billes de plomb, sous un soleil cruel.

Jean ne se souvenait plus très bien de la dernière occasion qui lui avait été offerte de parler. Cela remontait sans doute à plusieurs années, mais il ne pouvait plus l’affirmer…

Toutefois, il gardait de cet évènement un souvenir doux amer, comme un déchirement. Bien plus que ses paroles, il revoyait son geste, perdu, ridicule, au fond du jardin, son geste désespéré pour retenir Sophie, son long regard sur la voiture qui démarrait, et le visage, le beau visage de sa compagne, un visage tronqué dans le reflet du rétroviseur.

Elle ne s’était pas retournée, et la dernière image était restée partielle, dans la petite glace, quelques mèches de cheveux dorés, un petit nez, et une bouche un peu crispée, mais ferme.

Il n’entendait plus les paroles, mais ressentait, toujours vivant, le goût sensuel de ses baisers, ce goût à jamais égaré…

Sophie avait longtemps patienté avant de prendre sa décision, mais une fois celle-ci arrêtée, plus rien n’avait pu l’infléchir.

Aurait-il dû, ce jour là, pour la première fois, faire preuve d’autorité, confisquer ses clés de voiture, voire même l’enfermer ?

Lorsqu’il marchait ainsi, solitaire sous le soleil de l’après-midi, il se posait ces douloureuses questions à jamais sans réponse.

Sa promenade, invariablement le conduisait vers la corniche, avec la mer en contrebas, au fond de la vallée.

Quelques propriétés ornaient le paysage, laissant briller les tâches vertes de leurs piscines désertées sous le soleil. Que de soleil sur tant de désespoir !

Une borne, au bord du chemin, indiquait le village voisin, mais on ne pouvait plus distinguer le nom. La borne était brisée, tout comme la barrière de sécurité. Depuis tant d’années, rien n’avait changé, et le chemin restait tout tracé. Sophie, dans son dernier voyage avait marqué la route, ce chemin qu’elle avait emprunté seule, le laissant sur la terre, comme une plante brisée.

 

Ce jour là, Jean en eût assez de se poser des questions, de se parler en silence, et de taire ses pensées.

Ce jour là, Jean rejoignit Sophie…

Ce jour là, le soleil imposait un calme impressionnant sur la ville.


André Obadia
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À propos
ANDRE

Je vis le temps béni de la retraite! J'ai retrouvé le temps de penser et de réfléchir. J'aime beaucoup partager, aussi, au delà de quelques écrits personnels, j'essaie de vous informer des évènements et des sujets qui me plaisent...cela va de l'actualité politique, de l'art, du cinéma en passant par
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